CLAUDEL Paul
EXCEPTIONNEL EXEMPLAIRE D’OCTAVE MIRBEAU SUR HOLLANDE CONTENANT ENTRE AUTRES DEUX LETTRES AUTOGRAPHES INÉDITES SIGNÉES DE CAMILLE CLAUDEL
La Ville
Paris, Librairie de l’Art Indépendant, 1893
In-8°.
Plein maroquin rouge mosaïqué à larges grains (Marius Michel). Dos à 4 larges nerfs décorés de fines bandes mosaïquées de maroquin vert courant tout le long, entourés d’un filet doré, formant en tête et en queue un jeu de trois petits carrés. Plats richement décorés des mêmes bandes croisées mosaïquées de maroquin vert partant des quatre coins pour former de vertigineuses feuilles d’acanthe surmontées de 4 fleurs stylisées en forme de cœur mosaïquées de maroquin chocolat et moutarde, le tout entouré de filets dorés. Doublures de maroquin vert à larges grains décorés d’un décor mosaïqué de maroquin rouge de tiges de bambou avec à chaque coin un feuillage noué. Garde de moire rouge. Double garde de papier marbré en camaïeu mauve et rose. Couv. et dos cons. Toutes tranches dorées. Chemise à rabats de maroquin rouge et étui bordé de même (timides frott. à l’étui). Intérieur d’une très grande fraîcheur.
Édition originale publiée sans nom d’auteur. 1/25 exemplaires de tête sur Hollande (n°2).
Exemplaire d’Octave Mirbeau avec envoi autographe signé : « À M. Octave Mirbeau, hommage de l’auteur. P. Claudel »
Cet exemplaire est enrichi de 3 lettres autographes signées, dont 2 inédites de Camille Claudel, et d’un dessin, montés sur onglet, à savoir :
– Lettre autographe signée de Paul Claudel [à Octave Mirbeau (et non à Auguste Rodin, comme une note postérieure au crayon l’indique erronément)] écrite depuis New-York en date du 8 juin 1893. 3 pp. manuscrites sur double feuillet in-12°.
L’auteur commence par présenter ses excuses en faisant certainement référence à la publication de l’article « Ceux du Champ-de-Mars » de Mirbeau au mois de mai 1893 dans « Le Journal : supplément illustré du Salon 1893 » dans lequel ce dernier loue le génie de Paul et le talent de Camille Claudel : « Excusez-moi de ne pas vous avoir remercié des belles choses que vous avez dites de ma sœur et de moi. Pourquoi ne pas avouer que j’en ai ressenti un grand plaisir, séparé que je suis de la parole et des yeux de mes amis par la mer comme par une distance abstraite ? Je reconnais volontiers la justesse de vos critiques sur ces livres [à savoir, « Tête d’or » et « La Ville »], produits d’un esprit irrité et souffrant. J’espère arriver à écrire avec plus de sécurité et de force. ». Ensuite, il poursuit par une description très impressionniste de la ville de New-York qu’il découvre en tant que vice-consul, son premier poste diplomatique à l’étranger: « New-York est un endroit que je commence à trouver intéressant. […] C’est un vaste baraquement annexé à une jetée de débarquement et à un quartier d’affaires. Mais le milieu est très divers et très remuant. Il y a le bas-port avec ses sous-sols qui sentent le fruit mûr et le vieux sac ; il y a le quartier allemand ; les rues nègres terminées par le ciel rouge ; une extraordinaire rue italienne ; une rue chinoise avec un théâtre chinois qui fait mon bonheur ; un quartier de juifs où l’on trouve des théâtres qui jouent […] L’Anneau enchanté et le Roi Lear, en hébreu ! ». Il remercie une fois encore Mirbeau pour sa sœur et pour lui : « Je vous suis reconnaissant plus encore pour ma sœur que pour moi ; elle a une qualité d’imagination admirable. Et ainsi je vous remercie doublement. » Il achève sa lettre en parlant de Maurice Maeterlinck : « J’ai appris que Maeterlinck avait fait représenter Pelléas et Mélisande. J’espère qu’il aura eu le succès qu’il mérite. ». Magnifique lettre !
– Lettre autographe signée de Camille Claudel à Octave Mirbeau, située 113, Boulevard d’Italie [Paris]. 2 pp. ½ manuscrites sur double feuillet in-12°.
Non datée, elle a vraisemblablement été écrite quelques jours après la publication de l’article « Ceux du Champ-de-Mars » de Mirbeau au mois de mai 1893 dans « Le Journal : supplément illustré du Salon 1893 » dans lequel, pour la première fois, ce dernier met en lumière le talent de la jeune sculptrice. Il s’agit peut-être de la toute 1ère lettre de la sculptrice au critique d’art. Camille Claudel, d’ailleurs, commence sa lettre par ces mots : « Il me faudrait vraiment votre talent pour vous remercier dignement des lignes si élogieuses que vous nous consacrez dans « Le Journal ». Tout ce que je pense, c’est que la description que vous faites de mes figurines est bien plus belle qu’elles-mêmes ; d’après vous, on les pense encore bien plus violentes qu’elles ne sont. » Elle le remercie pour sa bienveillance à son égard ainsi qu’à l’égard de son frère et poursuit : « Je travaille depuis un an à un petit groupe de trois personnages que je veux appeler « le Calvaire » parce qu’il m’était inspiré par votre livre et aussi par ce que j’ai éprouvé moi-même. Lorsqu’il sera un peu plus avancé, si vous voulez me faire l’honneur de me donner votre avis, je serais très contente de vous recevoir à mon atelier, ainsi que Madame Mirbeau. »
– Lettre autographe signée de Camille Claudel à Octave Mirbeau, située 113, B[oulevar]d d’Italie [Paris]. 1 p. manuscrite sur double feuillet in-12°.
Non datée, elle a été écrite sans doute quelques jours après la publication de l’article « Çà et là » de Mirbeau au mois de mai 1895 dans « Le Journal ». Camille Claudel y fait immédiatement référence : « Merci à votre ami Kariste [personnage imaginaire avec lequel Mirbeau « discutait » à bâtons rompus dans certains de ses articles sous forme de dialogues incisifs] d’avoir si bien plaidé pour moi et à vous de votre plume puissante d’avoir traduit ses éloges. » Elle poursuit en évoquant l’œuvre dont parlaient avec enthousiasme Mirbeau et son « ami » : « Merci de vos encouragements dans la nouvelle voie où m’engage le groupe des Causeuses. ».
« Les Causeuses », alors œuvre en plâtre, a été exposée pour la première fois à l’occasion du Salon de la Société nationale des Beaux-Arts de 1895, objet de l’article de Mirbeau évoqué plus haut.
– Dessin à la plume en bordures d’un f. in-4° placé en format paysage, à l’en-tête du château d’Hostel à Belmont.
Non signé, on peut émettre l’hypothèse que ce dessin pourrait être de la main de Paul Claudel grâce à l’en-tête du château d’Hostel. En effet, le propriétaire de ce château n’est autre que Louis Sainte-Marie-Perrin, père de la femme de l’écrivain qui y passa de nombreux séjours dès 1900.
Ce dessin représente les remparts d’une ville fortifiée qu’une inscription latine permet d’identifier : « Urbs Jerusalem Beat̃ . », référence sans doute à la fois à l’hymne du 7e ou 8e siècle chanté dans l’Église catholique romaine et à la fin de cette pièce de Claudel où la ville devient le lieu de l’amour du prochain, union des hommes et de Dieu, préfiguration de la Jérusalem céleste.
Au verso du feuillet, quelques annotations au crayon donnant des indications typographiques (pour une édition illustrée de l’ouvrage ?).
Enfin, sous l’envoi à Octave Mirbeau à l’encre noire, on trouve un second envoi autographe signé de l’auteur à l’encre bleue : « A M. Marcel Silvain. Ce livre retrouvé. P. Claudel. Paris avril 1921. » Notons qu’à cette occasion, Claudel a daté son premier envoi à Mirbeau, « 1893 », à l’encre bleue.
Réf. : Catalogue Bibliothèque Octave Mirbeau – 1ère partie – mars 1919, lot 204.
L’ouvrage, alors, était recouvert de la reliure de Paul Vié, relieur attitré de Mirbeau, et contenait, outre les trois lettres de Paul et Camille Claudel, un billet d’Auguste Rodin, remplacé ici par le dessin.
Exemplaire plus que désirable !
Nous remercions vivement Madame Reine-Marie Paris, petite-fille de Paul Claudel et petite-nièce de Camille Claudel, dont elle est la spécialiste reconnue, et Monsieur Pierre Michel, Président de l’association internationale des Amis d’Octave Mirbeau, d’avoir confirmé le caractère inédit des deux lettres de Camille Claudel.
Estimation : 6500€ – 8000€
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